L'ermite vivait de la pêche et connaissait le langage du lac mieux que quiconque. Il passait la majeure partie de son temps, jour et nuit, à surveiller les lignes dormantes. Il vendait ses prises au village et traversait le lac une fois par semaine, le jeudi, pour vendre son poisson à Lac-Mégantic. On choisissait, on payait et on s’en allait : l’ermite était peu bavard.
Pourtant, il parlait bien et était fort respecté de tous. Il avait l’air bon garçon, mais le regard de quelqu’un qui se méfie de tout le monde. De temps en temps, il vous regarde sournoisement, et si ce n’était sa petite taille, ce regard serait embarrassant pour celui à qui il est adressé.
On raconte que lors de ses sorties, s’il voyait une femme cheminer en sa direction, il rebroussait chemin et s’éloignait en grognant.
Le seul à qui il s’ouvrait était Monsieur le curé. L’ermite assistait à la messe tous les dimanches, il avait sa chaise droite et son agenouilloir à l’arrière de l’église.
L'ermite était un sujet inépuisable, mais son souffle s’épuisa le 1er juin 1919. Il n’était pas à la messe du dimanche : on le retrouva couché dans son lit, une chaudronnée de soupe dormant sur le poêle éteint. On le coucha sur des planches posées sur les sièges d’un bateau, et on monta l’exposer au presbytère du village. Le curé J.A. Robidas célébra son service, et on porta sa dépouille au cimetière.
Lors du centenaire de Piopolis, les gens agés se souvenaient encore de cet homme estimé de tous. Leurs témoignages se retrouvent dans le livre du centenaire de Piopolis.Il menait une vie de simplicité et de solitude.