Le parc-plage Joseph-Rodger

Un parc en mémoire d'un grand bâtisseur

Joseph C. Rodger, circa 1880.

Le parc Rodger fut nommé en l’honneur de Joseph C. Rodger (1828-1913), celui qui a construit la première scierie du lac à cet endroit, en bordure de la baie Hammond, vers 1895.

Originaires d’Écosse, ses parents se sont établis à Brownsburg vers 1831 alors qu’il n’avait que trois ans. Joseph était l’aîné de la famille, il épousa en 1851 Catherine McClure (1827-1913) avec qui il eut dix enfants.

En 1892, il opérait un moulin à scie à Roxton Falls en Estrie, qu’il choisit de fermer avec l’intention de s’installer au lac des Seize Îles. Cette décision, loin d’être fortuite, était sans doute basée sur la connaissance du déploiement imminent du chemin de fer de colonisation de Montfort entre Saint-Jérôme et le lac.

Le premier moulin à scie

Le moulin à scie de Joseph C. Rodger vers 1900
Source: Luc Lamond, collection Peter et Sheilagh Johnson


Rodger avait posé sa cabane et les bases de sa future scierie à la tête du lac, là où était prévue la voie ferrée. Comme entendu lors de la fermeture de son ancien moulin, des familles qui travaillaient pour lui dans les Cantons de l’Est vinrent le retrouver au printemps1894, et en 1897.

Les premiers avaient emprunté le chemin Sainte-Marie, un «wagon track», depuis Morin-Heights et les seconds arrivèrent par le train qui était en fonction depuis 1895. Avec les maisons des Gagné, Dion, Collerette et Brin, le village prit forme et rapidement d’autres travailleurs vinrent se joindre à son entreprise.

Une industrie profitable

Joseph C. Rodger entouré de ses employés devant sa cabane en bois rond.
Source: Luc Lamond, collection Hal Myers


Le commerce du bois était très lucratif. Ce domaine d’activité était vital pour l’économie du pays, car il était le plus important produit d’exportation et le plus grand employeur. Les ressources autour du lac encore intouchées firent la prospérité de Rodger.

Plus qu’un patron, il s’investissait au bien-être de ses employés. Très tôt, il organisa des services religieux pour les travailleurs de confession catholique, donnés par le père Sabourin qu’il faisait venir de Montfort. Il offrit même une de ses terres pour la construction d’une chapelle.

Maison d'une de ses filles

Le Manor House
Source: Luc Lamond, collection Hal Myers


Joseph Rodger construisit des maisons pour trois de ses filles, deux d’entre elles étaient situées sur les îles Hawthorne et Rodger que l’on voit du quai. Après quelques années, il se bâtit une résidence spacieuse au-dessus de la plage actuelle.

Cette maison devint, plus tard, le «Manor House», un hôtel réputé jusqu’à sa démolition en 1970. À son arrivée au lac des Seize Îles, Joseph Rodger avait déjà 65ans, après dix ans de labeur, en 1903, il prit sa retraite, vendit son moulin et retourna à Brownsburg.

Le recul de la forêt

Vue du village vers 1901.
Source: Luc Lamond, collection Peter et Sheilagh Johnson


L’exploitation forestière changea radicalement le paysage pour plusieurs décennies à venir. À cette époque, les besoins en bois de sciage supplantaient ceux des billes équarries et le marché de l’Angleterre faisait place à celui des États-Unis. La côte est américaine avait déjà sacrifié ses forêts ancestrales et le pin blanc prisé pour sa légèreté et sa résistance disparaissait rapidement, même au Québec.

Les scieries du lac des Seize Îles fournirent le bois pour la réalisation des maisons et chalets de la municipalité. Il fut aussi envoyé par train à Montréal comme bois de chauffage et à des entreprises de matériaux de construction.

Les trains de billes

Moulin à scie des frères Duncan vers 1905
Source: Luc Lamond, collection Hal Myers


Trois autres scieries s’installèrent autour du lac. Le moulin des frères Duncan, en opération de 1905 à 1927, employait 25 personnes à l’emplacement de l’actuel stationnement municipal. Le moulin à scie, actionné par la vapeur, d’Adonias Stanislas Millette, et localisé au sud sur la rive du lac Laurel, fut en production pendant près de vingt ans à partir des années 1930. Et finalement, celui de Jean-Louis Laurin, érigé entre le chemin de la Montagne et la rue Gagné, fut en activité de 1945 à 1955.

Anecdote concernant le transport des billes de bois

Gilbert Cook dont la famille possédait un chalet sur leur île (Cook) se souvient de cette anecdote sur le transport des billes de bois:

«... le flottage du bois se faisait sur toute la longueur du lac jusqu’au moulin Duncan. Wallace Beaven avait le contrat pour tirer le radeau, formé par les troncs, avec un bateau à moteur d’environ 3-4 chevaux. Les grumes étaient coupées en hiver près du pied du lac. On les jetait dans l’eau lorsque le moulin démarrait au printemps. Après la formation du train de flottage, Beaven commençait le long, lent et ennuyeux travail de remorquage jusqu’à l’usine.

Les résidents du lac savent très bien à quel point les vents peuvent être variables en direction et en intensité. Le remorquage d’un barrage de grumes contre un vent fort était presque impossible. Un jour, alors qu’un vent puissant soufflait du sud, le train flottant est devenu incontrôlable et a atterri devant l’île Cook, collé solidement sur le récif. De là, il s’est étendu jusqu’à l’île Myers à l’est, bloquant complètement le canal entre les deux. Ce n’est que deux ou trois jours plus tard que le vent a changé et Beaven a pu le libérer et continuer son voyage.»

Cahiers d’histoire des Pays-d’en-Haut, cahierno.37, p.40, 1988.

Extrait de
Histoire et patrimoine de Lac-des-Seize-Iles

Histoire et patrimoine de Lac-des-Seize-Iles image circuit

Présenté par : Municipalité de Lac-des-Seize-Îles
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