Les personnages en blanc, au centre de cette photo de bûcherons prise en 1901, étaient essentiels au bon fonctionnement d’un chantier. « Le seul plaisir que les hommes avaient dans le bois, c’était de manger » affirmait en 1984 Gaston Gervais, de Saint-Jovite (1899 – 2003), qui a travaillé toute sa vie pour les compagnies forestières. Un mauvais cook était la pire calamité qui pouvait s’abattre sur un camp : s’ils mangeaient mal, les hommes jumpaient, autrement dit, ils quittaient le camp. Le cuisinier était non seulement responsable du secteur vital de la cuisine, où il régnait en roi et maître, mais aussi, dans une large mesure, du moral du camp.
Dans les gros chantiers de compagnie, chaque jour, sans répit, le cuisinier boulangeait sa « poche de fleur » (45,4 kg ou 100 lb de farine), préparait les fèves au lard, le bœuf, la soupe aux pois, les « galettages ». C’est lui aussi qui débitait les porcs et les bœufs. Six jours sur sept, il préparait aussi le repas que les hommes mangeaient dehors le midi. Le dimanche, les bûcherons avaient droit à quelque extra qui rompait la monotonie de l’ordinaire : de la soupe au riz et aux tomates, des toasts ou des tartes.
Plutôt rares dans les grands chantiers de compagnie, les femmes travaillaient parfois dans les « petits chaudrons », c’est-à-dire les camps de bûcherons gérés par des entrepreneurs locaux. Sur la photo, la petite silhouette en blanc, à droite du groupe de cuisiniers, est Rosina Locas : à 12 ans, elle travaillait comme aide-cuisinière dans ce camp de bûcherons situé à l’extrémité nord du lac Tremblant, non loin du lac Caché.
Source documentaire : Danielle SOUCY, La vallée de la Diable : de la hache aux canons à neige, [Saint-Jovite], Éditions du Peuplier, 1995.
© Collection Danielle Lagarde (famille Oscar Maher).