Le Régime seigneurial est un mode de colonisation inspiré de la féodalité française, de certains principes de jurisprudence et d'un certain cérémonial comme l'acte de "foi et hommage" durant lequel le seigneur se prosterne "genouil en terre" et se déclare vassal du roi. Ce dernier doit présenter, à un rythme régulier, un "aveu de dénombrement". Il s'agit, en quelque sorte, d'un recensement de sa seigneurie qui comprend les renseignements suivants: le nom des censitaires, leur titre, les cens et rentes en redevance, la portion d'arpents en friche et en culture, le nombre et les types de bâtiments érigés sur la terre du colon.
Comme principal devoir envers l'État, outre les rites cérémoniaux, le seigneur doit établir des colons sur l'immense étendue que lui a octroyée le roi. On appelle ce vaste territoire "une seigneurie" et les terres concédées aux colons "une concession". Ces derniers méritent leur parcelle de terre sous condition de procéder à son défrichement et à son exploitation, en plus d'y tenir "feu et lieu".
Le Régime seigneurial est à la fois, un système permettant aux autorités gouvernementales de contrôler les seigneurs dans leur rôle de "distributeur des terres"; un système motivant ce dernier à établir des colons; et un système protégeant autant le seigneur que ses censitaires.
LES DEVOIRS DU SEIGNEUR
Le seigneur a l'obligation de présenter à l'État son acte de "foi et hommage", confirmant sa fidélité au roi et son engagement à remplir ses devoirs envers lui. En considérant que sa tâche est d'établir des colons sur son territoire, il doit faire état, régulièrement, du peuplement de sa seigneurie en produisant un "aveu et dénombrement". Envers ses censitaires, le seigneur a l'obligation de tenir "feu et lieu" sur sa seigneurie. Il doit demeurer dans la maison seigneuriale qu'il a fait construire, ou sinon lui destiner un représentant. Le seigneur a aussi le devoir de construire et d'entretenir des moulins à farine. Au surplus, il est responsable de l'administration générale, de la protection civile et de la justice seigneuriale. Puis il contribue à l'établissement et à l'entretien des églises et des presbytères sur sa seigneurie, fréquemment contruits sur une portion de terre qu'il a cédée à la fabrique.
LES DROITS DU SEIGNEUR
Quelques-uns de ses droits honorifiques lui permettent de posséder un banc à l'avant de l'église qui lui est strictement réservé; d'être mentionné dans les prières publiques au prône le dimanche matin et d'être l'objet de manifestations civiles l'honorant. Beaucoup plus avantageux pécunièrement, le seigneur possède les droits de cens (redevances en argent), de rentes (redevances en nature), de mutation (lods et ventes), de mouture (le quatorzième minot) et de corvée (travaux exigés des colons pour l'entretien des routes, quais, ponts et bâtisses seigneuriales.
LES DROITS DES CENSITAIRES
Le colon est en droit d'exiger des structures seigneuriales; une concession, un manoir (lieu d'administration et de justice), des moulins, etc
LES DEVOIRS DES CENSITAIRES
Le colon a l'obligation de tenir "feu et lieu" sur sa terre, d'exploiter et de cultiver son emplacement pour le progrès de la seigneurie. L'habitant doit aussi rendre un acte de "foi et hommage" au seigneur. Une de ces manifestations est la "fête de Mai".
LE JOUR DES RENTES
Le jour des rentes est fixé à la Saint-Martin, soit le 11 novembre. Tous les censitaires de la Seigneurie de Beaupré viennent donc au manoir seigneurial, à Château-Richer, payer leurs cens et rencontrer leurs concitoyens. C'est la journée de rencontre annuelle par excellence de tous les colons de Beaupré.
Même après la conquête (1759-1760), le Régime seigneurial ne connaît aucune modification majeure jusqu'en 1774 lors de l'Acte de Québec. L'ordonnance adoucit, d'une certaine façon, le mode de transmission et de partage des terres et des biens des colons en leur permettant d'en disposer comme ils le souhaitent. Auparavant, le partage des biens était obligatoire entre tous les héritiers et provoquait un morcellement des terres. L'emplacement devenant trop petit et trop peu rentable, ces fils de cultivateurs quittaient et partaient coloniser d'autres territoires de la Nouvelle-France. Avec ces changements, souvent l'héritage était donné à l'aîné seulement. Ceci forçait souvent les autres enfants à devenir des employés du frère aîné car ils n'avaient aucun moyens pour partir et se marier éventuellement.
Source: Buteau, Lise (2005). « Château-Richer, Terre de nos ancêtres en Nouvelle-France », page 31-34