LA CULTURE DU LIN
La Côte de Beaupré s'est quelque peu démarqué au XVIIIe et XIXe siècle en faisant la culture du lin. Cette culture n'a jamais été faite pour en retirer un apport financier important mais avec les périodes de blocus navals des anglais, la culture du lin fournissait aux colons la matière nécessaire pour fabriquer des étoffes et des toiles.
Malgré une demande croissante et des offres incitatives du gouvernement anglais, cette culture est restée basse et essentiellement limitée à subvenir aux besoins personnels de première nécessité même si quelques uns tissaient des toiles et des étoffes pour les vendre à Québec. Il faut aussi prendre en compte que les colons n'avaient pas le savoir agricole pour asssurer la production de cette culture exigeante et poursuivre avec une transformation de qualité. Les étoffes et toiles produites étaient généralement grossières.
L'ÉVOLUTION DE L'AGRICULTURE
Dès les débuts de la colonie jusqu'au XXe siècle la pratique de l'agriculture est la première et la principale activité économique à Château-Richer. L'accroissement de la population et le développement de la région sont intimement liés au potentiel agricole. Aussitôt sa terre défrichée, l'habitant s'y établit de façon permanente à partir de la deuxième moitié du XVIIe siècle. L'agriculture, tout comme l'élevage, demeure longtemps une activité de subsistance.
En sa qualité de seigneur de la seigneurie de Beaupré, la Compagnie de Beaupré se conforme à ses devoirs envers ses censitaires et fait construire deux moulins pour moudre le grain. Un premier moulin à vent est érigé, avant 1657, sur la devanture de la terre appartenant à Olivier Letardif. Pour répondre aux besoins qui s'amplifient au rythme de la colonisation, un deuxième moulin, celui-ci à eau, est construit en 1661 sur les bords de la rivière du Sault-à-la-Puce. Ces deux moulins desservent toute la seigneurie de Beaupré jusqu'à la construction d'un troisième moulin, vers 1690, à Saint-Joachim. En 1695, Mgr de Laval fait construire le premier moulin industriel en Nouvelle-France sur la rivière du Petit-Pré.
Outre le blé et l'avoine, les habitants sèment en moindre quantité du seigle, de l'orge, du maïs et des pois. On pratique également la culture du lin pour la fabrication de vêtements et la culture du tabac.
Malgré le ravage et la désolation provoqués par la guerre de la Conquête de 1759, les habitants rebâtissent les maisons et les granges, et cultivent à nouveau leurs champs et potagers. La pratique agricole reprend sa place. Encore au début du XIXe siècle, elle est la principale activité économique. La culture du blé domine tant en qualité qu'en quantité sur les autres types de grains. Il y a bien quelques années de mauvaises récoltes mais aucune autre culture ne la surpasse jusqu'en 1830-1840, où celle de l'avoine devient d'importance équivalente. Il ne faudra que quelques années pour voir chuter la culture du blé et assister à la progression de celle de l'avoine. Beaucoup moins exigeante, la culture de l'avoine recouvre les champs de la Côte et connaît son apogée entre les années 1831 et 1871. Par la suite, elle subit un ralentissement pour être graduellement détrônée par les cultures fourragères. .L'avoine continue cependant d'alimenter le cheptel de l'habitant tandis que les cultures fourragères servent à nourrir les troupeaux de vaches laitières, un phénomène apparu vers 1881-1891.
Les moulins érigés sur la Côte en fonction de la culture du blé sont particulièrement ralentis jusqu'à cesser leurs activités au milieu du XXe siècle. Désormais, les habitants font leurs provisions de farine chez le marchand général. Les habitudes alimentaires se modifient, apportant moins de pain sur la table mais plus de pomme de terre, un légume qui fait son apparition vers 1830.
Pour pallier à la perte de revenus et les transformations des structures économiques qu'avait entraîné la chute du blé puis celle de l'avoine, les agriculteurs concentrent leurs activités dans les cultures maraîchères et les vergers, tout en espérant séduire le marché de Québec. Les récoltes sont abondantes et la vente de fruits et légumes rapporte une belle somme aux habitants.
Également, celui-ci s'intéresse davantage à l'exploitation de son érablière. Les produits de l'érable lui permettent d'offrir un nouveau produit au marché de Québec. Ce commerce saisonnier prend son essor au début du XIXe siècle.
Selon le recensement de 1861, Château-Richer est la paroisse où il se produit le plus de livres de sucre d'érable, soit 102,182 livres de sucre par année. Les premières cabanes à sucre apparaissent au milieu du XIXe siècle, Auparavant, les sucres se faisaient en plein air.
Au XXe siècle, la vocation agricole sur la Côte-de-Beaupré accorde une place privilégiée à l'industrie laitière et à la culture maraîchère, deux pratiques agricoles amorcées à la fin du siècle précédant.
Les cultures céréalières s'estompent avec le temps. Le lin et les vergers sont progressivement délaissés et les érablières connaissent un sérieux déclin. La mécanisation des fermes chasse peu à peu les chevaux des fermes. L'arrivée du P'tit Train de St-Anne en 1889 et du Boulevard Sainte-Anne a contribué au désintéressement des jeunes cultivateurs pour la terre familiale. On voit aussi s'accentuer la prospérité des industries de la pierre et le commerce du bois. On retrouve aussi l'attrait de la ville. L'instruction supérieure est plus accessible. Tous ces changements accélèrent l'exode des terres vers la ville.
Dans les années 60, un nouveau phénomène apparaît; la création de banlieues et l'étalement urbain. Les terres délaissées sont vendues en tout ou en partie pour la construction de nouvelles maisons. En 1978, la "Loi de la protection des sols agricoles" ralentit cette expansion urbaine et le morcellement des terres. Elle contribue sans aucun doute à préserver le paysage rural et agricole de Château-Richer.
En 2005 il ne reste qu'onze agriculteurs à Château-Richer.
Source: Buteau, Lise (2005). « Château-Richer, Terre de nos ancêtres en Nouvelle-France », pages 198-202
L'ÉVOLUTION DE L'ÉLEVAGE
Aux premiers temps de la colonie, l'habitant ne constitue son cheptel de bêtes qu'en fonction de ses besoins personnels et non à des fins commerciales. Il pouvait toutefois en faire commerce sur le marché local mais rarement à celui de Québec.
Le cheptel des habitants de la Nouvelle-France se compose de bovins, destinés à labourer la terre; de chevaux, plutôt rares au XVIIe siècle mais de plus en plus nombreux avec le temps, pour le transport de la marchandise et comme moyen de déplacement; de moutons, surtout au XIXe siècle, dont la laine sert à faire des couvertures et des vêtements en "étoffe du pays" ou droguet; des porcs et des volailles pour la nourriture.
En 1762, 478 habitants de Château-Richer se partagent un cheptel bovin de 325 bêtes.
Avec l'apparition de la culture de l'avoine, la pratique de l'élevage prend de l'expansion. La présence, en 1831, de moulins à fouler et à carder la laine érigés à Château-Richer témoigne de l'abondance des moutons sur notre territoire. Le cheptel ovin connaît une progression surprenante. De 660 bêtes en 1765, il se compose de 4,833 bêtes en 1831. cependant, il décroît en milieu du XXe siècle, comptant 1591 bêtes de moins qu'en 1831. Il disparaît graduellement à partir de la Seconde Guerre mondiale.
Au XIXe siècle, le cheptel des bêtes à cornes est principalement composé de boeufs, de veaux et de vaches. Ces dernières sont en moins grand nombre jusqu'à la fin du XIXe siècle, Vers 1891, on commence à remarquer le phénomène inverse. L'industrie laitière se développe. Quelques beurreries voient le jour sur la Côte. Château Richer ouvre sa première beurrerie en 1899. De plus, des habitants se construisent une petite laiterie personnelle. Vers 1844 le cheptel bovin a aussi favorisé l'ouverture d'une tannerie à Château-Richer.
Source: Buteau, Lise (2005). « Château-Richer, Terre de nos ancêtres en Nouvelle-France », pages 203-204