Monument de Reesor Siding

Ce monument controversé commémore l’un des conflits de travail les plus mortels de l’histoire du Canada, survenu en 1963, au terme d'une grève d'un mois impliquant 400 bûcherons et leur employeur.

Le conflit concerne le gel des salaires des bûcherons suite à une proposition de l'empoyeur de travailler 7 jours sur 7 pendant deux mois afin de remplir des objectifs de quotas.

L’atmosphère tendue finit par exploser le 10 février 1963 lors d’une confrontation mêlant 400 grévistes. Le bilan: cinq blessés et trois morts: Fernand Drouin, Irénée Fortier et Joseph Fortier.

Le monument commémorant la grève de Reesor Siding s’élève à 10 mètres de hauteur. Au sommet, on aperçoit un bûcheron muni d’une hache, avec sa famille, en hommage aux grévistes. Le syndicat local a érigé le monument malgré le désarroi de certaines personnes. Des dissensions existent encore de nos jours à ce sujet.

L'histoire de Resort Siding ne s'arrête pas là. Ce lieu correspond à un embranchement ferroviaire autour duquel il y avait, dans les années 1920, un petit magasin, une scierie, une église, une école et même un court de tennis! En tout, une centaine de personnes vivaient autour d'ici, surtout des mennonites et des Canadiens français.

La plupart des commerces et institutions ont fermé dans les années 40 suite à la Grande Dépression. Plusieurs familles ont alors quitté. Celles restantes ont du lutter fort pour survivre. À fin des années 1940, la plupart des terres avaient été abandonnées et, au moment de l’incident tragique de 1963, il ne restait que six fermes dans la région.

Le village disparu de Reesor Siding n’est pas à confondre avec celui de Reesor, située 2,8 kilomètres plus à l’Ouest. Reesor est un lieu mythique connu pour ses granges abandonnées et ses maisons qui s’écroulent au milieu de nulle part.

L’incident à Reesor Siding a débuté le 14 janvier 1963, lorsque quelque 1000 employés de Spruce Falls Power and Paper Company à Kapuskasing ont entrepris un débrayage illégal. Bien que les hommes aient arrêté de produire du bois à pâte, le moulin a continué à fonctionner sans eux, car des fermiers locaux à contrat l’approvisionnaient du bois requis pour la production.
 

La direction du moulin refusait implacablement de négocier avec les grévistes. Le 10 février 1963 au soir, la grève a atteint un point d’éclatement. Environ 400 grévistes se sont rendus à Reesor Siding pour démanteler les cordes de bois empilées par les fermiers et les travailleurs contractuels.

En arrivant sur les lieux, les grévistes ont fait face à des policiers les avertissant de ne pas mettre le pied sur la propriété. Tendus, à bout de nerfs, les hommes ont avancé sur les policiers. Un fermier a tiré un coup d’avertissement en l’air, cherchant à les éloigner. Mais les grévistes ont rapidement assiégé la ligne policière. C'est à ce moment que les fermiers, craignant mourir, ont tiré des coups contre les grévistes. Au bout du compte, 11 grévistes ont été atteints par balles dans cette fusillade, dont trois mortellement.

Environ 20 fermiers ont été arrêtés et accusés de meurtre non qualifié, mais à la suite d’un procès intensif de trois jours, ils ont été trouvés non coupables puisque leurs vies étaient en danger.

Lors du jugement, plus de 200 grévistes ont été arrêtés pour leur participation à l’émeute. Il ont été détenus pendant deux semaines au centre pénitentiaire de Monteith. Parmi eux, 137 ont été trouvés coupables d’attroupement illégal et condamnés à une amende totalisant 27.000 $, que le syndicat a payée.

Ironiquement, la grève a pris fin avant le 17 février, date à laquelle le gouvernement provincial a imposé l’arbitrage obligatoire. Même s’il n’y a eu aucun autre incident par la suite, l’animosité entre les parties a persisté pendant de nombreuses années.