Vous êtes ici devant l’Anse de la Descente-des-Femmes… et déjà, le nom intrigue. D’où vient cette appellation si particulière ?
Sur les cartes les plus anciennes, on retrouve sa trace dès 1825. Le nom varie d’un document à l’autre — baie de la Descente-des-Femmes, ruisseau de la Descente-des-Femmes, l’Anse aux Femmes… Mais avant même ces mentions, une carte du père Laure, datant de 1731, nommait plutôt cet endroit « l’Anse du Manitou »… un mot d’origine autochtone qui signifie « être mystérieux » ou « mystère ».
Alors, que s’est-il passé ici pour que l’endroit hérite d’un nom aussi évocateur ?
La Commission de toponymie du Québec retient une version qui remonte à une époque où les femmes innues attendaient le retour de leurs maris partis à la pêche. Perchées sur les hauteurs, elles guettaient leurs embarcations. Et plutôt que d’emprunter les sentiers sinueux qui descendent vers l’anse, elles se seraient laissées glisser sur la pente douce pour aller à leur rencontre. Une descente, donc… de femmes. Poétique, non ?
Mais comme souvent, plusieurs versions circulent. Certaines bien plus dramatiques. Dans l’une d’elles, des femmes innues, perdues en forêt, auraient sombré dans la folie de la faim, tentant l’impensable pour survivre, avant de se jeter dans les eaux sombres du Saguenay. Une autre raconte qu’elles fuyaient un conflit, sans doute domestique, et auraient pris la fuite par l’anse.
La version la plus ancienne, notée en 1828, évoque un groupe d’Innus surpris par la faim en pleine expédition de chasse. Les femmes auraient été envoyées chercher de l’aide et, guidées par leur instinct, seraient sorties de la forêt ici même, à la hauteur de cette anse.
Vous êtes donc debout sur un lieu de mémoire — et de mystères. Peu importe la version qu’on choisit de croire, une chose est certaine : l’Anse de la Descente-des-Femmes est connue et fréquentée depuis bien avant l’arrivée des premiers colons. Elle garde, dans son nom même, la trace des femmes autochtones qui ont foulé ses rives, qui ont attendu, fui, ou affronté la nature ici même, là où vous vous trouvez.
En regardant les pentes qui bordent l’anse, imaginez ces silhouettes glissant en silence vers la rive, ou celles qui y ont vu un refuge. Ces récits, qu’ils soient réels ou issus du folklore, rappellent un lieu de légendes profondément marquée par la mémoire des femmes.