Ce petit bâtiment, qui semble avoir vu des jours meilleurs, pourrait passer inaperçu… Et pourtant, il a longtemps résonné des rires d’enfants et du grincement des bancs d’écoliers. Vous êtes devant ce qui fut jadis une école de rang — probablement la dernière encore debout à Saint-Charles-de-Bourget.
Imaginez la scène : un rang de campagne, des champs à perte de vue, une route de terre… et chaque matin, des enfants qui arrivent à pied, les bottes pleines de boue, cartable à la main. Tous les niveaux réunis dans une même pièce, sous la gouverne d’une institutrice souvent jeune, parfois à peine plus âgée que ses élèves. Elle habitait l’école ou était logée chez un cultivateur voisin. C’était ça, une école de rang.
Ce modèle apparaît un peu partout au Québec à partir de 1829, lorsque l’État commence à structurer l’enseignement public. On en construit là où les villages s’étendent, au rythme des défrichements et de la croissance des familles.
Celle que vous voyez ici aurait été bâtie vers 1925, selon les registres d’évaluation. Mais comme on comptait déjà trois écoles de rang dans le secteur dès les années 1905-1911, il est bien possible qu’elle soit plus ancienne qu’on ne le croit. Elle a servi jusqu’à la construction du couvent des Sœurs de Notre-Dame-du-Bon-Conseil, lorsque l’enseignement a été centralisé et confié aux religieuses.
Observez bien la façade : cette grande porte de grange n’est pas d’origine. Elle a été ajoutée plus tard, lorsque le bâtiment a été recyclé pour des usages agricoles — entrepôt de machinerie ou de récoltes — puis transformé en remise.
Ce petit bâtiment est bien plus qu’un cabanon vieilli : c’est un témoin silencieux de la vie rurale d’autrefois, de l’importance qu’on accordait à l’éducation, même dans les coins les plus reculés du Québec.